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Quand le Paris d'Orient s'embrase



2019 fut une année riche en mobilisation, et ces dernières semaines une nouvelle vague de manifestations ont implosé aux quatre coins du monde; à Hong Kong ; au Chili et ces derniers jours au Liban. Cette contestation, généralement motivée par une hausse du coût de la vie, et de larges inégalités ; trouve racine bien plus loin : corruption, hausse du coût de la vie ; revendications politiques et sociétales...


Zoom sur les manifestations au Liban

C’est suite au projet de taxe sur les appels du réseau WhatsApp que sont sortis dans la rue les libanais le 17/10/2019. Cette taxe fut l’impôt de trop : donnant l’impulsion à cette manifestation populaire largement inspirée du mouvement des gilets jaunes, et de l’Hirak algérien, rassemblant près de la moitié de la population, toutes confessions confondues, sans leader.


Mais pourquoi tant de mobilisation ?

Les revendications de ce mouvement sont dirigées contre la classe politique libanaise. A travers cette contestation se cache une volonté ; celle du peuple Libanais à se réconcilier avec lui-même, près de trente ans après une terrible guerre civile, divisant le pays, et laissant un État à feu et à sang. Le pays du cèdre dut alors entamer une politique de reconstruction, renaitre de ses cendres, néanmoins 15 ans plus tard ces réformes passées semblent vaines.


Décryptage de la situation :

Le Liban est un pays terriblement endetté ; sa dette avoisine aujourd’hui près de 160% de son PIB. Celle-ci entrainant une dégradation des services publics, des pénuries, des licenciements massifs, une hausse du chômage et par réaction en chaine, une baisse de salaires. Conduisant ainsi, à un appauvrissement global de la population tandis que les1% des plus riches détiennent 58% des richesses.

La corruption est le maitre mot de ce mouvement ; celle-ci d’ordre matériel et moral touche l’ensemble du pays. Et c’est le peuple libanais qui en subit les conséquences. C’est pourquoi, à travers le slogan « Tous, c’est à dire tous » le peuple libanais demande le départ de l’ensemble de sa classe politique, sans exception. Cette volonté s’explique par la présence d’une classe gouvernante monopolisant le pouvoir depuis plus de trente ans. Une élite prise dans un engrenage de corruption depuis les années 90, période où sous occupation syrienne l’argent étatique et les aides internationales furent dilapidés, une corruption préexistant à la réforme radicale du système en 2005 suite à la révolution des Cèdres. De plus, le gouvernement ne parvient plus à répondre aux problématiques du pays, via une politique économique et sociale efficiente. Ceci accentuant le problème du régime Libanais, une république ; dont le système est fondé sur le confessionnalisme[1]. Ce qui induit une hétérogénéité gouvernementale et de fait nulle opposition, celle-ci au fondement de la démocratie. Ce mouvement n’est donc finalement qu’un miroir de la fracture gouvernants/gouvernés, une tendance mondiale, s’exportant à travers les continents.


la révolution libanaise est-elle amorcée ?

Le « dégagisme » semble être LA solution nécessaire à l’apaisement populaire. Cependant celui-ci parait difficile, voire inenvisageable par le pouvoir public qui a opposé une fin de non-recevoir. Tout comme pour les autres puissances régionales, qui ont fait du Liban le théâtre par terrain interposé, d’un affrontement idéologique. En effet du fait de la nature multiconfessionnelle du Liban ; 60% de musulmans (31% de chiites, 29% de sunnites) 20% de maronites 5% de druzes et 15% (orthodoxes et autres), et de sa position géographique à l’épicentre du Moyen-Orient. Le territoire libanais offre aux acteurs régionaux, principalement l’Arabie saoudite, l’Iran ou le Hezbollah un secteur clef dans cette lutte. Ces puissances se rajoutant ainsi à cette ingérence, en appuyant certains partis politiques ou en les finançant ; afin de défendre leur modèle. L’ex premier ministre Saad HARIRI (sunnite) à la tête de la coalition « courant du futur » est soutenu et financé par L’Arabie saoudite. Au contraire, le président de la république Michel AOUN (bloc du changement et de la réforme) est soutenu par l’Iran, et le Hezbollah (chiite). C’est finalement le premier ministre qui s’est résolu, après près de 13 jours de manifestations à donner la démission de son cabinet. Néanmoins, ceci ne semble pas avoir éteins la flamme contestataire, le peuple en veut plus, il faut que le gouvernement récupère son crédit et sa légitimité en entamant une réforme profonde de son système politique et ce, sans conserver les travers du passé.


ARNAUD CLÉMENCE


[1] Répartition proportionnelle au poids de chaque communauté religieuse

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