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CANTAT, POLANSKI... DEVONS-NOUS DISSOCIER L’HOMME DE L’ARTISTE ?

12 mars 2018 devant la salle du Rockstore à Montpellier, une cinquantaine de personnes est là, pancartes « Assassin » à la main. L’assassin en question c’est Bertrand Cantat, ex-leader du groupe Noir Désir condamné en 2004 à 8 ans d’emprisonnement pour le meurtre de sa femme Marie Trintignant. Relâché en 2007, chacun de ses retours sur le devant de la scène provoque de vives polémiques. Alors qu’il devait assurer une tournée des zéniths en vue de la sortie de son dernier album « Amor Fati », il fut contraint de tout annuler. La Une que le magazine Les Inrocks lui a consacré a suscité de vives réactions dans les médias.


Le public de ses derniers concerts en salle et en festival fut accueillis par des insultes. La polémique Cantat pose alors la difficile question du droit à la réinsertion. La réinsertion d’un artiste passe par sa promotion, sa présence sur scène et dans les médias, il n’y a pas un statut particulier pour ce métier. Il est évident que ce n’est pas l’assassin que son public vient applaudir mais bel et bien l’artiste, celui dont la plume fut acclamée à l’unanimité du temps de Le vent nous portera et de l’Homme pressé. Il n’excuse en aucun cas l’horreur du crime mais demande simplement le droit de pouvoir l’écouter sans jugement.





Le cas Bertrand Cantat fait écho à celui de Roman Polanski. Le 24 février 2017 a eu lieu la 42ème cérémonie des Césars, Polanski devait être son président. Ce ne fut pas le cas. L’annonce de sa désignation a suscité l’indignation sur les réseaux sociaux, et les associations féministes ont directement appelé au boycott. La pétition qui a suivi a recueilli 60000 signatures. Pour rappel, le réal- isateur a été poursuivi en 1977 pour le viol d’une adolescente de 13 ans et relâché sous caution quelques mois après. Polanski est ensuite parti vivre en France où il a réalisé de nombreux films, la plupart salués par la critique, le faisant gagner un certain nombre de récompenses. Mais à chaque nouveau film, le débat est relancé. Selon Laurence Rossignol (ancienne ministre des droits des femmes) cela reflète « une espèce de banalité à l'égard du viol, nous évoluons dans la culture du viol c'est-à-dire qu'une agression sexuelle, le viol, tout cela n'est pas si grave » Pour d’autres, il est important de dissocier l’homme de l’artiste car, malgré son acte injustifiable, Roman Polanski est un cinéaste de très grand talent. De ce fait, il semblait avoir toute sa place à la présidence des Césars. A Hollywood, un autre réalisateur est au coeur du débat : Woody Allen. Aujourd’hui, le financement de ses films s’avère de plus en plus compliqué. A l’heure actuelle Amazon s’interroge sur l’avenir de sa collaboration avec le cinéaste, accusé d’avoir abusé de sa fille adoptive. A ce jour, Allen est toujours déclaré non-coupable mais le lynchage médiatique oblige certains acteurs à déclarer regretter d’avoir travaillé pour lui. C’est le cas des acteurs de sa dernière réalisation « A rainy day in New York » qui ont reversé leurs salaires à des associations luttant contre les agressions sexuelles.


Manon Sauvetre

Article paru dans la Ruche - janvier 2019

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